De quoi s'agit-il ?
Les reliquats de la guerre de 1939-1945 dans le Roussillon sont relativement rares. On trouve par-ci par-là quelques anciennes positions stratégiques ayant contenu une tourelle ou un canon. Parfois, ces vestiges passent inaperçus. Ainsi, le mur du front de mer de Banyuls-sur-Mer est en partie un mur anti-char, construit pour un éventuel débarquement sur le littoral méditerranéen. Mais c’est peut-être à Torreilles-Plage que ces vestiges sont les plus marquants.
Il faut se remettre dans le contexte. À la fin de 1942, les Allemands décident de défendre le littoral méditerranéen en construisant une ligne de défense légèrement à l'intérieur des terres, qu'ils appellent le Südwall. Cette ligne devait être défendue en différents endroits par des points d'appui, des systèmes installés sur la plage afin de ralentir le débarquement allié. Le point d'appui de Torreilles est celui qui a été le mieux conservé de toute la côte catalane et constitue à lui seul un témoignage important de la Seconde Guerre mondiale. C'est un site à accès libre ; les bunkers se trouvent dans une zone protégée, il faut donc les observer depuis le sentier qui longe la côte.

Ce point d’appui, nommé "Lgs082", se compose de 14 constructions : 1 Ringstand pour tourelle de char (Bf 236), 4 Ringstande pour mitrailleuse ou mortier (Bf58c), 1 abri pour 6 hommes ou soute à munitions (Bf52a), 4 abris pour 12 hommes (Bf52a), 3 citernes et une casemate (R612). La casemate est le bâtiment principal, destinée à protéger le côté sud du point d'appui. Elle est massive, construite sur un plan à peu près rectangulaire, avec le côté orienté vers la plage en pente, ce qui provoque probablement un effet de rebond pour les obus. Elle est dotée de deux arcs de protection d’environ 50 cm de hauteur, orientés vers le nord. C’est la construction la plus marquante, qui ressort de la plage. Elle est partiellement taguée de nos jours et n’est pas spécialement entretenue. D’un autre côté, sa solidité laisse penser qu’elle ne risque pas de se désagréger.
Les quatre abris sont semblables. Ces bunkers de type Ringstande Bf58c formaient une ligne de défense le long de la côte. Il s’agit de petits bunkers enterrés. Côté nord et sud, ils ont deux entrées simples non protégées, et aucune ouverture face à la mer, ce qui prouve qu’ils n’étaient pas destinés à la défense frontale. À ras du sol et de la même couleur que le sable, ils étaient très difficiles à détecter ; à la construction, les ouvriers ont incrusté des galets dans le béton frais pour renforcer cette illusion. On peut même passer à côté sans les remarquer, les confondant éventuellement avec des fondations pour installations touristiques jamais construites.
Le bunker de type Ringstand Bf236 était surmonté d’une tourelle de Panzer II équipée d’un canon et d’une mitrailleuse. Les abris à l’arrière protégeaient le personnel et stockaient les munitions, et étaient accompagnés de trois citernes. Ce point d’appui pouvait accueillir jusqu’à 50 hommes.