De quoi s'agit-il ?

L'ermitage Notre-Dame de Pène est un édifice religieux situé à flanc de falaises au-dessus du village de Cases-de-Pène. Il est discret lorsqu'on passe en voiture sur la route nationale à ses pieds, car sa couleur se fond dans celle des rochers sur lesquels il est bâti, obligeant à lever les yeux pour l'apercevoir.

Les premiers temps

Comme beaucoup d'ermitages en Roussillon, Notre-Dame de Pène n’a pas été construit directement pour cet usage. Le site abritait à l'origine un château médiéval destiné à surveiller la vallée de l'Agly. Ce château, mentionné en 1011 sous le nom de Castellum de Pena, se situe au sommet du pic Rodon, à 335 mètres d’altitude.

Comme tous les châteaux de l’époque, il comprenait une chapelle castrale, utilisée également comme église paroissiale pour les habitants de Cases-de-Pène. La première mention de cette chapelle date de 1224 sous le vocable de Sancta Maria de Pena. Progressivement, le château perdit son intérêt stratégique et fut abandonné. Une trace historique subsiste encore en 1414 avec la construction d’une citerne. À cette époque, la pratique de l’érémitisme commençait à se diffuser dans la société catalane. Quelques ermites pionniers s’installaient dans ces anciens lieux de culte, vivant en grande autarcie. La première trace d’un ermite à Notre-Dame de Pène remonte à 1488, avec Fra Daniel Benet.

Les ermites

Le XVIIe siècle marque l’essor des ermitages. Cette pratique ancestrale, déjà présente au IXe siècle en Catalogne Sud, se développa rapidement. Les anciennes chapelles, qu’elles soient d’origine paroissiale ou castrale, furent réhabilitées et souvent agrandies avec des bâtiments annexes pour accueillir l’ermite. L’ancienne église Notre-Dame de Pène apparaît ainsi sous le vocable de Hermita de Nostra Senyora de Pena en 1688.

Les ermites du Roussillon, aux XVIIe et XVIIIe siècles, n’étaient pas des religieux isolés. Ils faisaient partie de la société civile catalane et étaient accessibles aux habitants. Leur savoir et leur bon sens étaient précieux, et ils étaient consultés pour résoudre des problèmes de moralité ou de vie quotidienne.

Cette situation prit fin avec la Révolution française. En 1790, la jeune République déclara les biens de l’Église possessions de l’État. Tous les édifices non paroissiaux furent vendus, dont Notre-Dame de Pène, rachetée par la municipalité de Cases-de-Pène.

Quelques années plus tard, les lois anti-cléricales furent assouplies et les ermitages purent rouvrir au culte. Notre-Dame de Pène reprit cette fonction en 1843 après réhabilitation. Un nouvel ermite, laïc et vêtu en tenue catalane plutôt qu’en bure, occupa alors la chapelle. Il assurait encore la quête et la présence spirituelle, mais sans l’aura des anciens ermites. Le dernier ermite disparut dans les années 1950, marquant la fin de cette tradition. La chapelle fut restaurée une dernière fois en 2000, notamment le logement de l’ermite.

De nos jours, l’ermitage est décoré avec d’anciens objets liturgiques détournés de leur fonction : chasubles, chapelets, tableaux, lumignons, statuettes, etc. Le grand escalier qui mène à la chapelle compte 50 marches (selon les sources).

Chaque année, un aplec est organisé à Notre-Dame-de-Pène, à l’occasion de la Pentecôte.

Étymologie

La chapelle est consacrée à Notre-Dame. Le mot "Pène" signifie "rocher" en catalan, une appellation parfaitement justifiée par la situation de l’ermitage au sommet de la falaise.