De quoi s'agit-il ?
Le Palais des Rois de Majorque est un magnifique édifice du XIIIe siècle, situé en plein cœur de Perpignan. Bien plus qu’un simple château, c’est un véritable palais construit à l’époque de la scission de la Catalogne. Au début du XIVe siècle, la Catalogne fut scindée avec la création d’un royaume éphémère, le royaume de Majorque, dont la capitale continentale était Perpignan. C’est dans ce contexte qu’a été érigé ce palais royal.
Le palais est de style gothique, reconnaissable à ses grandes arches. Ses murs sont en galets de rivière et briques liés au mortier, le tout enduit de chaux et peint. La pierre de taille a été largement utilisée pour les portes, fenêtres, angles de murs, escaliers et tours. Les marbres locaux – bleu, rose, rouge et blanc – ont été choisis pour leur élégance.
Les chapelles du rez-de-chaussée, très fastueuses, témoignent du raffinement des rois et de leur attachement au monachisme franciscain. Elles se superposent pour former un ensemble rappelant un donjon féodal, caractéristique de ce bâtiment.
Visite
Le plan de visite du Palais des Rois de Majorque met en valeur quelques points remarquables du site :

- Légende
- 1. Tour de l'Hommage
- 2. Salle à manger du roi
- 3. Palais blanc
- 4. Chambre primitive du roi
- 5. Salle de Majorque
- 6. Galerie et portail de la chapelle haute
- 7. Chapelle Ste Croix
- 8. Appartements du roi
- 9. Galerie de la reine
- 10. Salle à manger de la reine
- 11. Chapelle Ste Madeleine (rez-de-chaussée)
L’entrée du palais est protégée par un fossé et une barbacane crénelée. La porte d’origine se trouvait au sud de la Tour de l’Hommage, adossée à l’étage de la salle du trône.
En 1337, Jacques III publie les "Lois Palatines". Ce texte novateur, rédigé en latin et illustré de miniatures, décrit minutieusement l'organisation des services de la cour et la vie du palais. Il est conservé à Bruxelles (Bibliothèque royale Albert 1er).
Dans l'aile Sud, la Grande Salle, ou aula, de style gothique méridional, accueillait banquets, conseils royaux et parlements. Ses murs étaient ornés de tapisseries et elle conserve encore sa cheminée, près de laquelle un escalier permettait d’accéder aux cuisines situées au rez-de-chaussée.
L'art de la table était raffiné à la cour. Aux XIIIe et XIVe siècles, véritable âge d'or, on rédige en Catalogne le "Sent Sovi", premier recueil culinaire. Sucré-salé, aigre-doux, épices orientales… la cuisine de l’époque offrait des saveurs étonnantes. Le décor était à l’avenant : sol jonché de plantes aromatiques, nappes de draps blancs brodées, céramiques de Manises, vaisselle d’or et d’argent…
L'accès à la chapelle haute, dédiée à la Sainte Croix, se fait par une galerie. Sa façade en marbre présente un portail en plein cintre abritant une porte de style mudéjar. À l’intérieur, les clefs de voûte et culs-de-lampe sont sculptés de saints et d’anges. Une frise inspirée de la calligraphie arabe court au-dessus de fausses tapisseries peintes. De part et d'autre du chœur, des trompes d’angle soutiennent de fausses baies, tandis que de véritables meurtrières protègent les fenêtres.
En dessous se trouve la chapelle Sainte Madeleine, prolongée par la sacristie. Ici, les saints et anges sont remplacés par des motifs floraux et fruitiers sculptés et peints. Le carrelage mudéjar, d’inspiration hispano-mauresque, et la frise de style grec confèrent au décor un caractère méditerranéen. Les vitraux ont été restaurés. On suppose que la chapelle haute était réservée au roi et aux grandes célébrations, tandis que la chapelle basse servait à la reine.
Perpignan accueillait de nombreux ordres religieux. Les Mercédaires, chargés du rachat des chrétiens captifs des Maures, étaient soutenus par le roi et les seigneurs. Les Templiers, diplomates et gestionnaires, veillaient sur le trésor royal jusqu’à la dissolution de l’ordre en 1312. Les ordres mendiants, dominicains et franciscains surtout, exerçaient une influence considérable : leur idéal de pauvreté séduisait les petites gens et les marchands délaissés par l’Église. Un profond élan de spiritualité franciscaine gagna la famille royale : le fils aîné de Jacques II renonça au trône pour devenir moine franciscain à Perpignan.
La tour des chapelles domine les appartements royaux, reliés par un couloir : le souverain logeait côté nord, son épouse côté sud. La loggia de la cour de la reine conserve un superbe plafond. Avant la construction de la citadelle, un pré séparait la ville du palais, au-delà du fossé nord. À l’est se trouvaient une figueraie et une oliveraie, et au sud, un verger de treilles, d’orangers et de citronniers s’étendait jusqu’au rempart sud de la cité.

Dans les années 1930, alors que les remparts de Perpignan étaient en pleine démolition, le palais des rois de Majorque conservait encore ses fossés non remblayés. La photo ci-dessus montre l’état du palais à cette époque.