De quoi s'agit-il ?
La Roque d'En Talou est un simple rocher devenu célèbre car il marque la frontière entre l'Aragon, au sud, et la France, au nord. De nos jours, on peut encore voir gravées les armes des deux familles d'Aragon et de France, de part et d'autre du rocher. Il se situe sur le territoire de Montner, en Fenouillèdes.
Voici l'origine de cette frontière.
La fin du XIIe siècle est marquée dans le sud de la France par ce que l'on appellera plus tard « l'hérésie cathare ». Cette vision de la chrétienté étant jugée illégale par l'Église, les tenants de cette nouvelle religion devaient être reconvertis ou supprimés. Mais bien plus qu'une lutte locale entre deux religions, c'est la création d'un nouveau royaume qui est l'enjeu de ce combat. En effet, le principal défenseur des cathares était le comte de Foix, allié à ses beaux-frères le comte de Provence et au roi d'Aragon, qui possédait le Roussillon. Cette alliance aurait pu donner naissance à un grand royaume allant de l'Atlantique aux Alpes, situé entre la France et la future Espagne.
Devant cette menace, le pape mit les moyens pour détruire les cathares. Pierre II le Catholique, roi d'Aragon, meurt, et son royaume est confié par le pape aux bourgeois de Barcelone le temps que l'héritier, futur Jacques Ier le Conquérant, puisse prendre en main son royaume. Le Fenouillèdes, région limitrophe entre l'Aragon et la France, était mal délimitée. Cet état de fait doit être corrigé, ce qui fut fait en 1258 avec l'établissement d'une frontière précise, passant entre Latour-de-France et Montner, chacune devenant ville-frontière.
Pour matérialiser physiquement cette frontière, un rocher fut gravé avec deux armes : côté Aragon, la croix d'Aragon, une croix pattée ; côté français, les armes du seigneur de Montesquieu du Lauragais, à qui appartenait la tour de Triniach (aujourd'hui Latour-de-France).