Histoire
Les origines
Le village de Corsavy est construit sur un site préhistorique datant du néolithique final (-1000 av. J.-C.). C'était l'époque de la civilisation mégalithique, et le dolmen retrouvé à Corsavy est particulièrement connu, on le nomme "Dolmen de la cova de Rotllan". Si cela apporte la preuve d'activités humaines sur ce territoire à une époque si lointaine, rien ne vient étayer une telle présence avant l'époque carolingienne, au IXe siècle.
En fait, la première trace écrite que l'on a de Corsavy date de 992, ce qui est déjà assez ancien. Il s'agit d'une mention de l'église paroissiale Saint Martin, celle-là même qui se trouve à l'est du village, sur la route d'Arles (elle sera abandonnée au XIIe siècle au profit d'une autre, aujourd'hui remplacée par l'actuelle église paroissiale). S'il y avait une église, il y avait forcément un embryon de village, aussi peu peuplé soit-il, mais tout de même un cœur de village. L'église et son secteur géographique furent cédés en 1001 par Bérenger, évêque d'Elne, à Sintilla, abbé d'Arles, en échange d'autres biens.
En 1007, une donation importante est faite par le comte Bernard Taillefer à l'abbaye d'Arles (sur Tech). On y lit "Feo de Cortsavino", ce qui accrédite la thèse que le village n'était alors qu'un assemblage de fermes isolées appartenant au comte de Bésalu, fermes tenues en fief par un certain Savin. Treize ans plus tard, en 1020, on trouve un acte de donation du fief, alors tenu par le seigneur Oriol (entre-temps il avait donc changé de mains), du comte de Bésalu à sa fille Constancia. C'est ainsi que le village changea de propriétaire, aussi bien sur le plan politique que dans sa vie quotidienne.
Naissance de la famille de Corsavy
On retrouve une trace de Curtis Savino en 1106. Cette année-là, un habitant de ce lieu est témoin d'un legs fait par le comte de Bésalu à l'église Saint Paul de Narbonne. Cet habitant, Ramon Brachiatti, que l'on retrouve aussi sous le nom de Ramon Bracals et qui est le père de Raymond de Serralongue, fut seigneur de Corsavy. Ce Raymond Bracars rendit hommage pour la première fois à Guillaume II de Castelnou en 1067.
À cette époque, durant les XIe et XIIe siècles, les familles importantes des villages achetèrent rapidement les terres, devenant de grands propriétaires terriens et, par là même, des personnalités locales. Les chefs de ces familles reçurent le surnom de "Monsieur", pour les distinguer des autres. "Monsieur", en catalan "Senior", a donné "Seigneur" : c'est ainsi que s'est formée la classe dirigeante. Tout cela pour dire qu'à la moitié du XIIe siècle, on trouve une famille dirigeant Corsavy, pas encore déclarée "seigneur", mais qui se distingue déjà des autres.
En 1158, Raymond de Cortsavy, son frère Guillem et leur mère Ermessende assistent à la consécration de l'église d'Arles. Curieusement, cette famille était également présente l'année suivante à la consécration de l'église de Saint Pierre de Riuferrer, mais absente à celle de Saint Jacques, à la même époque. La raison est que Saint Jacques, située à l'intérieur du château féodal, était, par annonce de l'évêque d'Elne Artal II, une dépendance de Saint Martin, échappant au pouvoir de la famille de Corsavy. Donc Saint Jacques leur échappait aussi, ce qui explique leur refus de se rendre à la cérémonie de consécration.
Successions des seigneurs
Raymond de Cortsavy, qui par ailleurs sera nommé évêque de Majorque, était le petit-fils de Ramon Bracals, dont nous avons parlé plus haut. Il était issu d'un second mariage entre sa fille Ermessende et le seigneur de Serralongue, Bernard Hug. On peut donc dire que Corsavy passa alors dans les mains de la famille de Serralongue.
Peu de temps après, le village fut cédé à Bernard de So, en même temps que le village de La Bastide, dans les Aspres. En 1280, le seigneur de Corsavy était Arnau. Il épousa Gueralda d'Urg, issue d'une riche famille qui possédait Finestret. C'est justement ce village qui fut l'objet de la dot de Gueralda, mais le couple ne put pas le conserver. Arnau réapparaît en 1314 lorsqu'il donne caution de 60 000 sols barcelonais avec Arnaud de Castelnou et Bérenger d'Oms pour la dot de Gueralda de Rocaberti, promise en mariage à Guillaume de Canet.
Le 8 des calendes d'octobre 1335, le seigneur de Corsavy céda le village à Jacques II de Majorque, roi alors en plein essor. Mais lorsque cet éphémère royaume disparut, conquis par le royaume d'Aragon, il passa tout naturellement à ce nouveau roi. À la fin du XIVe siècle, Jean Ier d'Aragon nomma le donzell Pierre de Rocafort "châtelain de Cortsavy", dont la seigneurie avait été temporairement donnée à la reine Yolande. La fin du XVe siècle fut agitée pour le Roussillon. Pour mater la révolte catalane, le roi d'Aragon Jean II s'allia avec le roi de France Louis XI, qui fit une incursion pour s'emparer de Barcelone. Ayant perdu la bataille, il se repliât sur la France et conserva le Roussillon. Peu à peu, Jean II soumit Barcelone et récupéra les châteaux perdus face aux Français. Celui de Corsavy fut repris en 1474, puis abandonné définitivement. Le village se maintint toutefois malgré cette perte d'importance stratégique. En 1621, une nouvelle église fut construite, celle-là même qui est en activité de nos jours. Peu à peu, la population s'accrut pour donner le village que nous connaissons aujourd’hui.
Système de défense du village
Corsavy était protégé par un château possédant une forge (activité importante dans la région), une chapelle, etc. Il est aujourd’hui en ruine, mais ses pierres ont servi à la construction des maisons attenantes. Ces maisons, abandonnées de nos jours, sont toujours debout au sommet de la colline surplombant le village.
De plus, le village était autrefois protégé par une tour à signaux, en relation avec le château de Cabrenc et celui de Batère. Elle se trouvait au nord-ouest du village, à plusieurs centaines de mètres de celui-ci.