Règnes des rois de Majorque

1276-1344 : Histoire politique du royaume

L'histoire du royaume de Majorque est courte, mais intense. Obligé de faire des choix face à ses puissants voisins, il subit l'inévitable dérive qui le mena à son extinction.


Jacques II de Majorque (1276-1311)

Les rapports entre Pierre III d'Aragon, l'aîné, et Jacques Ier de Majorque, le cadet, tous deux fils de Jacques Ier le Conquérant, furent toujours tendus. Le roi d'Aragon voyait les terres de son frère comme une verrue dans les siennes, tandis que le roi de Majorque y voyait une entité cohérente.

Voir aussi : Généalogie des rois d'Aragon et de Majorque

Mais les deux royaumes manquaient d'équilibre, Majorque étant beaucoup plus petit que son voisin. Jacques II de Majorque se vit donc contraint, en 1278, de prêter serment au roi d'Aragon Pierre III, le plaçant dans une situation de vassalité vis-à-vis de son frère. Un exemple de cette vassalité réside dans le fait que le roi d'Aragon imposa le mariage du fils cadet de Jacques Ier, Frédéric III de Sicile, avec la fille de Charles d'Anjou, ceci dans le but de faire arrêter les conflits entre les maisons d'Aragon et d'Anjou.

Le 10 novembre 1285, Pierre III d'Aragon décède. Son fils Alphonse III d'Aragon monte sur le trône et poursuit la politique de son père, qui visait à récupérer par la force le royaume de Majorque. Il faut dire que cette année-là, suite aux Vêpres siciliennes, le pape ordonna une croisade contre l'Aragon, croisade organisée par le roi de France. Pris entre deux feux, Jacques II de Majorque choisit le parti de la coalition et autorisa les troupes françaises à passer sur son territoire. Mais la vindicte des habitants fut plus grande et l'armée s'embourba un temps avant de pouvoir franchir les Pyrénées, avec déjà pas mal de pertes. Ainsi, lorsque les troupes françaises, défaites (le roi de France étant mort à Perpignan à son retour), quittèrent le Roussillon, Alphonse III ne se priva pas de l'envahir. La légendaire fuite de Jacques II de Majorque par les égouts du palais des rois de Majorque date de cette époque.

En même temps, Alphonse III organise une expédition contre l'île de Majorque qui se soldera par un succès. Perpignan prise, il repart à Barcelone, laissant Jacques II de Majorque revenir dans sa capitale. Ce dernier parviendra à libérer le Roussillon, mais la Cerdagne resta aragonaise, ainsi que les îles Baléares.

À la mort de son père en 1291, c'est Jacques II qui prit la couronne d'Aragon. Il fut le premier à ne pas suivre l'effort de guerre contre son voisin, effort pourtant initié par son père et grand-père. Jacques II d'Aragon conserva toutefois l'île de Majorque, obligeant son rival à vivre dans son palais de Perpignan.

En 1301, le roi de Majorque autorisa la construction de la quatrième église de Perpignan, La Réal. Elle prit ce nom car elle était face à son palais. Un épisode militaire faillit avoir lieu en Capcir quelques années plus tard, en 1304. Il faut savoir que le comte de Foix devait rendre hommage au roi d'Aragon pour le Donnezan, une terre située entre Narbonne et Carcassonne, et ce depuis l'épopée cathare. Or, devant les difficultés du roi de Majorque, il tenta de récupérer sa vassalité et monta une petite armée qui prit position sur le Capcir, exactement à Formiguère, Puyvalador, Creu (hameau au pied du col du même nom) et en Cerdagne à Evol, Estavar et Carol. Tous ces villages étaient des biens de Guillem de So, vicomte d'Evol, son vassal. La guerre fut évitée grâce à l'arbitrage énoncé en 1304 par d'une part le vicomte de Narbonne (représentant de Gaston de Foix) et d'autre part Pierre de Fenouillet (représentant du roi). Cet accord stipulait que le Donnezan restait sous la tutelle du comte de Foix et que celui-ci s'engageait à rester fidèle à ses engagements envers le roi. Il fixa également une frontière définitive entre Donnezan et Capcir : (d'Est en Ouest) d'Anglars à Canolera, le col de Marrana, du serrat jusqu'à l'Aude, Belfumats, le col d'Ares puis le long de la ligne de partage des eaux.

C'est en 1311 que Jacques II décéda, exactement le 29 mai. Il laissera le souvenir d'un roi qui tenta toute sa vie de se défendre contre plus fort que lui.


Le règne de Sanche Ier de Majorque (1311-1324)

Successeur sur le trône de Majorque, Sanche Ier, son fils, reçut une proposition de paix de Jacques II d'Aragon. Blasé de part et d'autre de cette guerre fratricide, ils signèrent un traité permettant à Sanche de récupérer les îles Baléares.

Point culminant de la paix retrouvée, la conquête de la Sardaigne en 1323 fut effectuée en partie avec des troupes du roi de Majorque. Il faut dire que le roi de Sardaigne, Mariano III, était mort sans enfant légitime. Son fils naturel, Hugues, n'était pas reconnu par la population, aussi les habitants appelèrent-ils à l'aide le roi d'Aragon, ce qui explique la prise de l'île par les armes.

Sanche Ier lancera de grandes constructions : la cathédrale de Perpignan, le Campo Santo et divers autres bâtiments importants de la ville. Atteint d'asthme, il se reposait régulièrement dans son château de Formiguères en été pour échapper aux fortes chaleurs. Il y décéda le 4 septembre 1324. Son corps fut enterré à Saint-Jean-le-Vieux en attendant la fin de la construction de la cathédrale, mais au moment du transfert, il ne fut jamais retrouvé.


Le règne de Jacques III de Majorque (1324-1344)

Sanche n'ayant pas de fils légitime, il confia le pouvoir au fils de son frère Ferran, Jacques. Ferran fut son tuteur (décidé par un codicille pris à Formiguères) car il n'avait que 9 ans au moment de la mort de Sanche. Jacques III devient donc roi de Majorque. Il se marie avec la fille du roi d'Aragon afin de participer à l'effort de paix entre les deux royaumes. Il poursuivit sa politique d'expansion de la ville de Perpignan. C'est essentiellement durant ces années que la capitale du royaume prit une considérable expansion. Les artisans se multiplièrent, augmentant ainsi l'économie de la ville. Le commerce le plus florissant était celui des drapiers, qui devinrent la spécialité de Perpignan.

Face à lui, Jacques II d'Aragon décède. Son successeur, Alphonse IV d'Aragon, prend le pouvoir, mais poursuit lui aussi la politique de paix de son prédécesseur.

Mais à sa mort en 1336, son fils Pierre IV reprend la guerre. Surnommé tour à tour "le Cérémonieux" ou "le Cruel", il organise une expédition de conquête de son voisin, motivée essentiellement par le fait que Jacques III de Majorque s'était allié avec son ancien ennemi, le roi de France, ce dernier toujours soucieux de se venger de l'affront fait d'une part au cours de la croisade de 1285, et d'autre part de l'attitude du roi de Sicile, fils de Jacques II de Majorque, envers Charles de Valois. Ainsi, les troupes françaises entrèrent en Roussillon, en Cerdagne et dans la ville de Montpellier, tandis que Pierre IV d'Aragon se chargea des îles Baléares, plus à l'aise sur l'eau que son voisin.

En 1344, le royaume de Majorque est définitivement conquis. Le 16 juillet de cette année, Jacques III de Majorque, qui s'était un temps enfui chez son vassal, le comte de Foix, se voit destitué de toutes ses terres. Mais ce n'est pas pour autant que la guerre fut finie.



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