Histoire
Vers la fin du IXe siècle, seule l'église de Formiguères existait (833). Il faut rappeler que les comtés n'avaient été conquis par les Francs que peu de temps auparavant (793-811). Ceux-ci, et en particulier Charlemagne, instaurèrent le système féodal. La vallée de l'Aude fut alors une possession du comte de Razès, qui la conserva jusqu'en 877, moment où elle fut rattachée au comté de Cerdagne, liant ainsi la vallée à la Catalogne plutôt qu’au Languedoc.
Vers la fin du IXe siècle, l'abbaye de Saint Jacques de Jocou, située en Razès, influença le comte afin qu’il fasse ériger des églises en Capcir. L’objectif était de fédérer les populations montagnardes autour des édifices religieux. C’est ainsi que Creu apparut pour la première fois en 965 sous le nom de Villa Cruce.
Durant le règne du comte de Cerdagne Seniofred (927-967), la villa de Creu fut donnée à l'abbaye Saint Michel de Cuxa. Son église dépendait de celle de Formiguères, qui, dotée d’un archiprêtre, avait autorité spirituelle sur la haute vallée de l'Aude. On retrouve Creu mentionné lors d’une donation faite par Guifred II, comte de Cerdagne, à son second fils Béranger, à qui il céda les montagnes des Madres avec les villas situées sur la rivière d'Aude, appelées Creu et Réal, ainsi que des prés, pacages et garrigues.
En 1204, Creu était tenu par Pierre de Domanova, seigneur de Rodès, pour le compte de Guillem de Castelnou, son vassal. En 1286, le village passa en possession de Guillem de So, vicomte d'Évol, un puissant seigneur qui contrôlait la plupart des hameaux du Capcir, à l’exception de Puyvalador et Formiguères, ville royale.
Les vicomtes de So ayant choisi de soutenir le roi de Majorque, lorsque Pierre IV d'Aragon récupéra les comtés, il confisqua la vicomté d'Évol et la remit au comte de Foix. Cependant, en 1381, le roi d'Aragon, endetté, vendit le « mere et mixte empire, host, chevauchée et tous les droits seigneuriaux et justiciers, en franc-alleu sur les lieux et le château de Creu » ainsi que sur divers hommes de Vilanova, au chevalier Bernat d'Oms.
En 1485, Creu fut vendu par Fahena à Laurent Paulet pour la somme de 285 livres. Son héritier Jean légua le hameau en 1549 à son fils Bernard Vivers. Ce dernier, endetté, dut céder Creu à son créancier Alexis Grimau. La famille Grimau, dont les descendants se joignirent à celle de Llupia, conserva Creu jusqu'à la Révolution française et la création des communes officielles.
Le village était encore habité au XIXe siècle, mais il fut peu à peu délaissé au profit de villages plus importants. De nos jours, il ne reste de Creu que quelques pans de murs de la tour et du mas principal, ainsi que des cultures en terrasses et leurs murs de soutènement.