Histoire
La dynamiterie Nobel
Le site de Paulilles n’a jamais véritablement été habité avant le XIXe siècle. Il est probable que des pêcheurs aient occupé ponctuellement les lieux, mais aucun village ne s’y était développé. Tout change en 1870. Cette année-là, une usine de dynamite appartenant à la société Nobel PRB (Poudreries Réunies de Belgique) s’installe sur les hauteurs de la baie. Le site est stratégique : suffisamment éloigné de la frontière allemande — alors que la guerre franco-prussienne bat son plein — il offre un emplacement sécurisé. C’est Léon Gambetta en personne qui pose la première pierre, le 3 décembre 1870.
Cinq ans plus tard, devant le succès commercial de l’usine, une extension est ouverte en direction du littoral. Un nouvel agrandissement est réalisé en 1879, portant l’effectif à 100 employés. La dynamite produite à Paulilles sert notamment au creusement du canal de Panama.
La fabrication d’explosifs n’étant pas sans risques, deux accidents mortels marquent l’histoire du site. Le premier survient le 25 juillet 1877 et provoque la mort de trois personnes : deux ouvriers et un contremaître. À cette époque, 39 ouvriers et 46 ouvrières y travaillent quotidiennement. Le second accident a lieu le 25 juin 1882 à 23 heures : une explosion tue 19 personnes, dont 7 originaires de Banyuls-sur-Mer.
Au fil du temps, avec l’évolution des technologies, l’usine diversifie sa production : elle fabrique également de la nitroglycérine et des produits en caoutchouc. Un véritable village ouvrier se constitue autour du site, hébergeant entre 200 et 300 personnes jusque dans les années 1970.
En 1966, une partie de l’activité explosive est transférée à Tautavel. Les deux sites deviennent alors complémentaires : à Paulilles, on prépare des plaques de métal, ensuite envoyées à Tautavel pour y subir les explosions. Le site de Tautavel est d’ailleurs toujours actif aujourd’hui.
L’activité industrielle de Paulilles prend fin en juillet 1991, lorsque la préparation des plaques est transférée à la zone industrielle de Rivesaltes, afin de faciliter le transport et limiter les risques logistiques.
Dans les années 1980, un projet de port de plaisance voit le jour : le « Port Méry », du nom de Jean-Claude Méry, promoteur immobilier et membre influent du comité central du RPR. Le projet sera finalement abandonné.
En 1998, le Conservatoire du littoral acquiert le site, grâce à un financement partagé avec le Conseil Général. D’importants aménagements débutent dès l’an 2000. Aujourd’hui, le site est géré par le Conseil Général des Pyrénées-Orientales, qui prévoit d’y ouvrir en 2008 un espace dédié à la mémoire industrielle du lieu, baptisé « Parc Nobel ».
Depuis 2008, des pistes sont également à l’étude pour la création d’un véritable musée, en partenariat avec la Catalogne Sud (afin d’intégrer l’activité industrielle de l’ensemble de la côte rocheuse dans une cohérence transfrontalière) et avec la fondation Nobel, en Suède.