Vilar Milar





Vilar Milar est un ancien village désormais disparu. De ce village, il nous reste un ermitage que l'on connait sous le même nom. Etrangeté propre à la région de Llupia, on se trouve ici dans un paysage... impressionnant. La ville de Llupia, à la fois toute proche et éloignée, est noyée dans les vignes qui s'étendent à perte de vue. L'homogénéité du paysage n'est brisé que par les quelques champs en jachère qui parsèment les vignes. Le ciel bleu d'été est lumineux, il éclaire les feuilles des vignes dans un tapis épais de verdure qui contraste avec le brun du sol calcaire. Au milieu de ce paysage, une route s'allonge, longue, droite. Au seul virage se dresse Vilar Milar, bâtiments incongrus au milieu des vignes.

Vilar Milar est connu sous la forme d'un ermitage, mais avant cette utilisation au XVIIe siècle, c'était une église, l'église paroissiale d'un village disparu. A côté de l'église les bâtiments, probablement ancien presbytère, se dressent, massifs et hélas en partie délabrés.

L'église est de loin lélément le plus intéressant. Monobloc comme l'était les église romane, elle se présente avec un plan rectangulaire. Son fronton est simple, il y a juste deux contreforts de petite taille, sans ouverture. Il est surmonté du clocheton, ajout tardif en cayrous qui dénotent par rapport à ses matériaux de construction, à savoir le galet de rivière pour la nef et la pierre de taille pour le chevet. Le chevet est justement le plus e plus intéressant de l'édifice, avec une belle rangée d'arcatures aveugles particulièrement profondes, ce qui est inhabituel dans ce genre d'édifice. Le chevet est aussi doté d'une fenêtre à simple embrasure dont l'arc en plein cintre est surligné par une rangée de briques rouges. D'autres contreforts ont permis à l'édifice de ne pas s'écrouler, il sont eux aussi assez petits. L'hémicycle formé par le chevet est d'une hauteur plus petite que la nef, il y a donc à l'intérieur un arc doubleau séparant le choeur de la nef. L'entrée de l'église est côté Sud, elle est encadrée de deux colonnes abîmées par le temps et elle est surmontée d'un arc en plein cintre à double voussures.

Le bâtiment de l'ermitage a été construit accolé à l'église. Petit bâtiment simple à un étage, il n'y a rien de spécial à dire dessus, si ce n'est qu'on lui a adjoint une ancienne grange, probablement au XVIIIe siècle.

Pour compléter le tableau il faut voir le puits qui a été creusé près du chevet. C'est un ajout moderne.



Situation et accès

Vilar Milar est un village disparu de la plaine du Roussillon, il est situé entre Ponteilla et Llupia. Initialement paroisse de l'évêché d'Elne, le hameau s'est peu à peu dépeuplé durant le Moyen-âge. La chapelle du lieu s'est alors transformée en ermitage.


Photos


Histoire

Le hameau initial

Vilar Milar ne se distingue pas particulièrement avant le Moyen-âge. En effet il n'a pas été retrouvé sur son territoire de dolmens ni de menhirs, preuve de l'habitat de nos lointains ancêtres du néolithique (-2500 à -2200), ni de reliefs des civilisations ibéro-ligures ou romaines. Et pourtant nul doute que toutes ces civilisations ont vécu un temps ici. Par la suite les wisigoths (412) et les sarrasins (739) n'ont pas laissé de vestiges non plus, mais pour eux le nombre de vestiges que l'on a retrouvé sur la région est extrêmement faible. Il est donc normal qu'à Vilar Milar on n'en ai pas non plus.

Il faudra attendre l'arrivée de carolingiens (811) et la conquête du Roussillon par Charlemagne pour que s'installe le système féodal du haut Moyen-âge et apparaissent ainsi les premiers villages tels que nous les connaissons. On trouve les premières mention de Vilar Milar en 1163 sous le nom de Ecclesia Sanctae Mariae de Villare Milariis. Mais d'après son architecture l'église Ste Marie de Vilar Milar fut bâtie au XIe siècle, soit un siècle auparavant. Celle-ci, d'origine romane, fut construit à cette époque, puis modifiée au XIIe siècle (remplacement de la charpente en bois par une voûte en pierre). Elle est à nef unique et à abside semi-circulaire. Elle contient des statues du XVIIe siècle représentant St Antoine de Padoue, St François d'Assise et Ste Elisabeth.

Extérieurement l'église de Vilar Milar est particulière dans la mesure où son chevet est décoré d'arcatures aveugles et de lésènes suivant un schéma unique en Roussillon. Par ailleurs, le portail de l'église a une clef gravée dans la pierre qui sert de clef de voûte.

Au XIVe siècle Vilar Milar va voir sa population décliner, puis disparaître totalement au profit des villages alentours (Ponteilla, Llupia). L'église est elle aussi abandonnée, elle est unie à l'église St Jean de Perpignan le 20 septembre 1341, en même temps que Ste Marie de Château-Roussillon et Notre Dame de Forques. A cette époque elle était qualifiée "d'église rurale". Une confirmation de cette union à lieu en 1401.


L'ermitage

Vers la fin du XVIIe siècle la notion d'ermitages va s'étendre en Roussillon. Alors que jusque là les ermites étaient considérés comme des solitaires, une sorte d'illuminées, leur nombre va d'un coup s'étendre. La fonction d'ermite évolue, ils deviennent un élément de la société catalane. Ils sont plus accessible, savent donner des conseils, servent de confidents. Cette époque voit fleurir un nombre considérable d'ermitages un peu partout en Roussillon.

Certains étaient installés dans d'anciens monastères ou prieurés, d'autres étaient construits de toute pièce. Mais la plupart étaient des anciennes églises rurales abandonnées auxquelles ont ajoutaient des logements pour la vie de tous les jours. Ainsi est apparu l'ermitage de Vilar Milar. Cet ermitage est cité en 1688 sous le nom de Hermita de Nostre Senyora de Vilarmilar. L'ermite participa à la quête rituelle dans tous les villages alentours, quête qui servait à maintenir une vie spirituelle dans la chapelle. Les ermites étaient appréciées, la fonction était importante. Tous les 8 septembre avaient lieu sur le site un aplec, fête locale regroupant toute la population des villages autour de son ermite.

Vint alors la révolution française et son lot de lois anti-cléricales. C'est en 1790 qu'eu lieu le coup d'arrêt des ermitages, une loi étant voté interdisant cette pratique. En Roussillon ce fut un tollé, les habitants tenaient à leurs ermites. Mais la loi fut la plus forte, Vilar Milar ferma. Il fallut attendre assez longtemps, en 1863, pour qu'il puisse rouvrir. La cérémonie fut officielle, suivit par une bénédiction. Elle fut également marquée par la cession de l'ermitage à la ville de Llupia, qui avait alors toute liberté pour nommer les ermites. En 1914, Vilar Milar fut ouvert au culte, mais cette époque marquait déjà le déclin de la fonction d'ermite, ce qui fut confirmé au cours des années suivantes.

Le 5 aout 1956 Vilar Milar est cédé à l'association diocésaine de Perpignan par un bail emphytéothique de 99 ans. Elle est alors en piteux état : plus de toit, seuls 4 murs et une partie de l'autel subsistent. Cet état n'empèche pas la célébration d'une première messe. Sa restauration commence dès 1956 sous l'initiative de l'abbé Serradeil, mais elle est longue et difficile à faire, en fait il s'agissait plus d'une sauvegarde et d'un nettoyage des restes.

A partir de 1987, une association prend le relais de l'abbé et poursuit les travaux, les accélérant. Les murs sont relevés, le toit est remis en place, le sol est cimenté. On commence à la remeubler, avec le retour de la Vierge de Vilar Milar, les statues en bois polychromes de St François, St Antoine de Padoue, de Ste Anne et la fameuse Capeleta de l'ermitage.


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