Chapelle du Dévot-Christ

Une étrange chapelle construite pour conserver un chef d'oeuvre


De quoi s'agit-il ?

La chapelle du Dévot Christ est une petite chapelle urbaine, à deux pas de la cathédrale de Perpignan. Elle fait partie de l'ensemble collégial de Perpignan comprenant le cloître-cimetière Campo Santo, l'église St Jean le Vieux, la cathédrale St Jean-Baptiste, la chapelle Funéraria et l'hôpital St Jean.

Cette chapelle a été construite pour abriter le Dévot-Christ, un chef-d’œuvre de la statuaire représentant le Christ en croix sculpté en bois. D’un réalisme époustouflant pour l’époque, cette statue fait l’objet d’une grande dévotion depuis des siècles à Perpignan et dans toute la région. Elle est particulièrement vénérée le jour du vendredi Saint, lors du jour de la Sanch. Au cours de l'histoire, une chapelle lui a été dédiée ; elle existe toujours de nos jours et est visitable à volonté.


Le Christ

Le Dévot-Christ est de style classique pour une œuvre religieuse. Il représente le Christ en croix, muscles détendus et tête baissée. La croix est reproduite sous forme de deux cylindres croisés à angle droit. Le Christ est vêtu d’un simple pagne blanc. Le plus marquant est le réalisme de son corps : les traits du visage sont marqués, les muscles des bras et des jambes saillants, et les côtes parfaitement visibles, ce qui est inhabituel pour ce type de représentation. L’auteur a également reproduit le creux du diaphragme et la tension des muscles du cou. De nos jours, on pourrait critiquer certains détails, mais savoir que cette œuvre date de la fin du XIIIe siècle nous replace dans un contexte historique qui invite à la modération.

Le Christ

Le Christ

Car cette œuvre a bel et bien été réalisée à la fin du XIIIe siècle, voire au plus tard au tout début du XIVe. On sait que des reliques ont été placées dans son dos en 1307 lors d'une cérémonie de bénédiction qui se tenait alors dans l'une des chapelles de l'église St Jean le Vieux, l’église initiale de Perpignan, jouxtant de nos jours la cathédrale. Elle a reçu sa propre chapelle bien plus tard, en 1543.

Initialement, on l’avait datée du XVIe siècle, mais il s’agissait d’une erreur d’interprétation d’un document ancien. Pour dater correctement l’œuvre au XIIIe siècle, il faut suivre les courants artistiques antérieurs à l’époque moderne. À l’époque romane, le Christ était représenté victorieux, en gloire ; ce n’est que plus tard qu’il est figuré torturé, avec un certain réalisme. En 1938, Frederick Deknatel, historien d'art américain, a rapproché cette œuvre du Christ de Sainte Marie du Capitole à Cologne et d’autres crucifix rhénans (Saint Séverin de Cologne, Andernach, Bocholt) : l’anatomie du corps est similaire et la croix actuelle, modifiée probablement lors de la restauration de 1529, conserve les traces d’une croix en upsilon typique. Cependant, le bois de tilleul et d’aulne utilisé infirme une origine rhénane et renforce l’hypothèse d’une création locale. Les travaux de Marcel Durliat en 1954 ont établi sa datation au début du XIVe siècle, confirmée par les études récentes menées pour sa restauration. On peut trouver des parentés stylistiques avec le Christ de la cathédrale de Palerme de Manfredi Chiaramonte (fin XIIIe) et même avec le Christ lépreux de la Bajasse, actuellement à la basilique Saint Julien de Brioude (XIVe). Cette œuvre constitue donc un élément majeur d’une famille de crucifix douloureux, conformes à la spiritualité franciscaine dominante à l’époque, en particulier au sein de la famille royale de Majorque.


Restauration

Sa plus récente restauration date de 1996, réalisée par le Centre Départemental de Conservation et Restauration des Œuvres d’Art (CDCROA). Les travaux ont consisté à enlever les différentes couches de cire et de fumée déposées sur la statue, ce qui l’a rendue plus claire et a fait apparaître des traces de polychromie, partielles mais existantes. Ce n’était bien sûr pas sa première restauration : une précédente a eu lieu en 1529, probablement pour modifier la forme de la croix, initialement en upsilon, puis en 1826, par Joseph Nègre.


La vénération

Le Dévot-Christ, classé monument historique dès 1892, a fait l'objet d'un culte continu depuis le XIVe siècle. On le portait en procession pour demander la fin de calamités telles que sécheresses, épidémies ou guerres. Il était et reste l'objet de vénération populaire, surtout lors de la Semaine Sainte : les enfants l'embaumaient avec de petites éponges imprégnées de parfum, on posait les mains sur la croix ou sur les plaies du crucifix, et l’on baisait les pieds ou les mains. Toutes ces marques de dévotion ont largement disparu, mais il continue à susciter une grande dévotion.

L'extraordinaire expressivité de ce Dévot-Christ explique la vénération ininterrompue dont il a été et reste l'objet. Il préside toujours aux cérémonies de la Semaine Sainte de la cathédrale. Sa réplique est confiée, d'année en année, à tour de rôle à l'une des confréries locales regroupées dans l'archiconfrérie de la Sanch. Une curieuse tradition populaire raconte que le visage de ce Christ s'incline insensiblement au fil des ans vers la poitrine et que, lorsque le menton touchera le thorax, la fin du monde sera imminente.


La chapelle

La chapelle du dévot-Christ

La chapelle du dévot-Christ


Construction et évolutions de la chapelle

En 1525, un document atteste que Joan d’Oms offre un terrain attenant à la cathédrale pour la construction d’une chapelle dédiée au Dévot-Christ. Il confie la construction aux chanoines en 1534, qui la bâtirent entre cette date et 1543. La statue est portée dans sa nouvelle chapelle le vendredi précédant la Semaine Sainte 1543. Elle y est toujours, bien que la chapelle ait été régulièrement modifiée.

Au XIXe siècle, on modifia le toit, le chœur et on plaça des vitrages opaques. L’intérieur fut ensuite refait dans le style néogothique en vogue à l’époque, avec des murs décorés de peintures murales de Pauthe, comme dans la cathédrale. Dans les années 1950, elle subit une nouvelle restauration intérieure, la dernière, car c’est dans cet état que nous la voyons aujourd’hui. Initialement, la chapelle prévoyait la présence d’un chemin de croix de grande dimension, mais seules deux stations furent réalisées. Ne pouvant pas les installer dans la chapelle sans les autres, elles furent placées dans le jardin derrière l’église Saint-Jacques. Un autre chemin de croix, plus discret, fut commandé et installé dans la chapelle, mais il ne s’harmonise pas totalement avec le décor épuré.

Enfin, une transformation récente a consisté à rouvrir la niche du chœur, auparavant masquée, pour y installer la statue sous une épaisse plaque de verre. Avant cela, elle était simplement accrochée au mur, mais dans cette chapelle ouverte à tous, le risque de vol ou de dégradation était trop important pour une œuvre si vénérée dans le Roussillon.


Photos

Situation et accès

La chapelle du Dévot-Christ est située à quelques mètres de l'entrée latérale de la cathédrale de Perpignan, elle est donc en plein centre-ville. Elle jouxte également le Campo-Santo. Elle se trouve à quelques mètres de l'entrée du Campo-Santo, aussi. Pour y aller, quand vous êtes devant la cathédrale, contournez-la par la droite, vous arriverez au Campo-Santo. L'entrée de la chapelle est là.



Rejoignez-nous sur les réseaux sociaux !

Facebook Instagram Bluesky Threads
Facebook Instagram Bluesky Threads
Drapeau catalan Les Pyrénées-Orientales

Copyright 2013 - 2025 - Toute reproduction interdite sans l'autorisation de l'auteur. Ce site Internet est un site privé, non officiel, issu du travail de compilation des oeuvres de différents auteurs. Sauf mention contraire, les photos sont la propriété du webmaster. Toute utilisation des textes, photos ou autres éléments de ce site internet sont interdits sans accord du webmaster.