Histoire
Préhistoire et Antiquité
Géographiquement, il faut savoir que la Salanque était, aux temps préhistoriques, une sorte d'immense marécage (d’ailleurs, le mot « Salanque », « Sal-anque », signifie « terres salées »). Aucun être humain n’y vivait alors, la zone étant impropre à l’habitat, et cela dura très longtemps. De plus, la terre acide de la plaine du Roussillon a empêché la conservation des ossements, ce qui explique le peu de traces préhistoriques connues sur le territoire de Claira.
Les premiers habitants indo-européens, chassés par les Celtes, n’ont pas laissé de traces. Les premières habitations datent en fait de l’époque romaine. Claira tire son origine d’un domaine agricole romain, attribué à une famille pour faire vivre la région après la colonisation militaire. Ce domaine, nommé « Villa », n’était pas isolé : les plus proches se trouvaient à quelques centaines de mètres seulement, et certains ont donné naissance à d’autres villages (comme Pia ou Saint-Hippolyte). La chute de l’Empire romain entraîna le déclin de ce domaine, qui ne fut pas repris par les Wisigoths, nouveaux maîtres du Roussillon. Puis vinrent les Sarrasins, chassés au-delà des Pyrénées par les troupes de Charlemagne, marquant le début de la période chrétienne.
Principale enluminure du capbreu de Claira/Millas, XIIIe siècle (voir tous les capbreus).
C’est à cette époque que le domaine agricole renaît. Quelques pionniers francs, venus du nord de la France, s’installèrent et relancèrent le domaine. Nous sommes alors au XIe siècle.
Moyen Âge
Peu à peu, le domaine s’agrandit et accueillit de nouvelles familles qui proliférèrent. Le véritable village tel que nous le connaissons se construisit durant le haut Moyen Âge autour du château du seigneur local, nommé « château de la Biterna », attesté en 1208. Le village ne semblait pas disposer alors d’une enceinte fortifiée.
Possession des rois de Majorque, Claira passa ensuite à l’Aragon avant de devenir propriété personnelle de Jeanne d’Aragon, fille de Pierre III. La seigneurie changea de mains à la fin du XVe siècle, passant à la famille d’Oms. On retrouve notamment Guillaume d’Oms, gouverneur de Majorque et seigneur de Claira ainsi que de Saint-Laurent de la Salanque. Il est probable que ce titre ait été accordé en récompense de son dévouement, car Claira était une terre royale au XVe siècle.
En 1493, après trente ans de guerre, Charles VIII de France et Ferdinand le Catholique se rapprochent. L’enjeu politique principal concernait la possession de la Cerdagne et du Roussillon. Cette année-là, le roi de France souhaita se défaire de ces territoires. Des représentants des deux parties se réunirent au château de la Biterna, à Claira, pour s’entendre sur les conditions, ce qui fut fait sans anicroche. On peut donc dire que la fin de la guerre de Trente Ans s’est conclue à Claira !
Renaissance et époque contemporaine
En 1600, l’administration du village est attestée. Deux pouvoirs coexistent alors : d’une part l’Église, représentée par le prieur de Saint-Pierre de Vilario, Antoni Azémar, et d’autre part l’université, c’est-à-dire un conseil composé des chefs de famille (Cap de Casa en catalan). Cette université, créée au XIIIe siècle, comptait trois consuls élus démocratiquement parmi les paysans indépendants, les pagès. Il s’agissait d’une structure ancienne et largement répandue dans la région.
Les épidémies de peste de 1588 et 1592 touchèrent de nombreux villages de la région. À Claira, la maladie arriva relativement tard et de manière peu fréquente, comme si le village bénéficiait de la protection du saint local.
Le 20 septembre 1600, le prieur obtint du pape les droits sur l’hôpital et l’aumônerie du village. À l’époque, beaucoup de villages possédaient leur propre hôpital, mais ils étaient initialement dépendants de l’université, trop pauvre pour assurer leur fonctionnement. C’est pourquoi le prieur intervint pour en prendre la charge, le pape imposant toutefois un tribut de l’université au prieur pour les frais.
Quelques années plus tard, la guerre franco-espagnole approcha. Toute la région s’y prépara. À Claira, les habitants s’armèrent et construisirent des remparts. Le 10 juin 1639, les Français, stationnés à La Palme, traversèrent les Corbières et envahirent la Salanque. Ils attaquèrent Opoul, Rivesaltes et Claira, qui furent pris le soir même. Les habitants durent fuir dans la plaine.
Les registres paroissiaux témoignent de l’absence de population dans le village pendant plusieurs années. Claira ne revit ses habitants qu’en 1642. En 1659, le Roussillon devint définitivement français suite au traité des Pyrénées.