Histoire
Vers la fin du IXe siècle, seule l'église de Formiguères existait (833). Il faut dire que les comtés n'avaient été conquis par les Francs que peu de temps auparavant (793-811). Ceux-ci, et en particulier Charlemagne, instaurèrent le système féodal. La vallée de l'Aude fut une possession du comte de Razès, et le restera jusqu'en 877, au moment où elle sera récupérée par le comte de Cerdagne, liant la vallée à la Catalogne et non au Languedoc.
Vers la fin du IXe siècle, l'abbaye de Saint-Jacques de Jocou, en Razès, influença le comte pour qu'il fasse créer des églises en Capcir. L'idée était de fédérer les populations montagnardes autour des édifices religieux. C'est ainsi que parut Réal et ses hameaux voisins. On trouve Réal lors de la donation de Guifred II, comte de Cerdagne, à son second fils Béranger. L'appellation qu'il utilise est : "Les montagnes de Madres avec les villas de la rivière d'Auda qu'on appelle Creu et Réal avec prés, pasquiers et garrigues." Notons le mot « garrigues », signifiant probablement autre chose que ce que l'on connaît aujourd'hui (c'était sûrement un synonyme de "broussailles"), ainsi que la mention du village de Creu, au pied du col du même nom.
Puis, en 1087, un autre acte de don fait à Guillem, petit-fils de Guifred II, nomme la "villa de Real", nom sous lequel est alors désigné le village.
Durant le XIIIe siècle, le roi d'Aragon confie à un certain Arnau Squillat, notaire à Villefranche, les droits de pêche dans la Lladura entre Formiguères et Réal, alors quasiment non peuplé.
Ce droit fut transmis à son fils Bernat, qui reçut du roi la châtellenie de Puyvalador. Bernat acheta la même année la dîme de Fontrabiouse ainsi que tout le territoire de Puyvalador. Il était déjà propriétaire du lieu d'Odeillo (Odeillo de Réal de nos jours, en Capcir) et devint plus tard viguier de Cerdagne et batlle de Puigcerdà.
Nul doute que ce personnage joua un grand rôle dans la structuration moyenâgeuse du Capcir au XIIIe siècle. Mais Réal était depuis 1276 en la possession de Pere d'Onzès. À sa mort, Hugues Squillat récupéra la seigneurie, ce qui laisse à penser que la famille Squillat, bien dotée par les rois d'Aragon, avait un pouvoir étendu dans la vallée du Capcir. D'ailleurs, Hugues rendit hommage au roi pour cette seigneurie.
Son fils Bernat, chevalier, devint seigneur de Réal en 1334, mais dix ans plus tard, le royaume de Majorque tombe. Le nouveau maître du Capcir, le roi Pierre IV d'Aragon, remanie complètement ses territoires. Les anciens seigneurs sont spoliés au profit d'autres, favorables à l'Aragon. C'est ainsi que la seigneurie de Réal passe sous la direction du comte de Foix, puis au seigneur d'Evol, vicomte et ancien possesseur de la plupart des autres hameaux du Capcir.
Nous avons quelques traces de l'évolution de la population de Réal durant cette époque. En 1359, le village comptait 9 feux, et en 1515, c'est-à-dire une fois l'épidémie de peste du XVe siècle endiguée, 8 feux.
Entre le XIVe et le XVe siècle, Réal fut cédé à Arnau Béranger Vidal, de Fuilla. À sa mort, le frère de celui-ci hérita de la seigneurie et c'est ainsi que Réal passa à un certain Bernat Colomer. En 1500, on trouve Réal en tant que possession de la famille de Banyuls, suite au rachat de la seigneurie par Jean, seigneur de Banyuls de Montferrer. Le village resta dans cette famille jusqu'à la Révolution française. En 1687 par exemple, la seigneuresse était la veuve de Charles de Montferrer, lointaine héritière de Jean et seigneur de Réal et d'Odeillo, fille des comtes d'Ille, marquise de Montferrer depuis 1675.
Et une anecdote pour finir : à la fin du XVIIe siècle, la France envoya des régiments de cavalerie s'installer un peu partout, surtout sur les frontières. En 1690, c'est à Réal et à Matemale que le régiment de cavalerie Légat prit ses quartiers.