Histoire
Préhistoire
Le site de Villefranche est avant tout un site préhistorique, comme en témoignent les très célèbres grottes d'En Gorner, des Canalettes et la Cova Bastera. Cette dernière a une double particularité. Tout d'abord, aux alentours de -12 000 ans, elle a servi de support à des hommes préhistoriques pour des dessins faits à la peinture rouge. Hélas, ces dessins n'ont rien de comparable avec ceux contemporains de la grotte de Lascaux. Deuxième particularité, la grotte sera fortifiée par Vauban durant le XVIIe siècle.
Origine de la ville
La ville de Villefranche-de-Conflent fut créée en 1095 par Guillaume-Raymond, comte de Cerdagne, petit-fils du comte Guifred, le fondateur de Saint-Martin-du-Canigou. On lui adjoint un commandement militaire, car sa situation encaissée lui permettait de barrer la route de la Cerdagne aux invasions toujours menaçantes des Sarrasins. Déjà à l'époque, le système défensif avait été étudié ; la ville était surveillée par un système de tours et surtout dotée d'un épais rempart.
Villefranche durant le Moyen Âge
En 1117, par le jeu des héritages, le Conflent et la Cerdagne passent aux mains des Comtes de Barcelone, dont le dernier devient roi d'Aragon. Cette année-là, la ville reçoit le siège de la Viguerie et le Tribunal. En 1263, le roi ordonna la construction de trois ponts de façon à faciliter l'accès à la ville. Les années qui suivirent marquent l'apogée de la ville.
Les remparts ont été consolidés par les souverains aragonais, puis un peu plus tard par Ferdinand V, roi d'Espagne. L'histoire de Villefranche-de-Conflent bascule en 1344. Jacques III de Majorque, maître du Roussillon, du Conflent et de la Cerdagne (ces trois régions étaient incluses dans le royaume de Majorque) se fait ravir son royaume par Pierre IV d'Aragon, son rival. Le Conflent est alors remis sous gouvernement aragonais. Mais sans abdiquer pour autant, Jacques III monte une armée et traverse le Conflent, tentant de renverser les villes perdues. Il faut dire que Villefranche, tout comme les autres villages, était en faveur de Jacques III qui, les années auparavant, leur avait laissé une grande liberté. La ville s'ouvrit donc à son ancien roi, mais ce fut de courte durée : défait à nouveau, Jacques III s'enfuit en France. Les villes repassèrent sous le contrôle de Pierre IV qui réprimanda fortement la population.
En 1377, un autre événement survint. L'infant Jacques, prétendant à la couronne d'Aragon, monte une expédition contre le Roussillon et remonte la vallée de la Têt. Là encore, Villefranche accueille à bras ouverts ce nouveau conquérant, la population laissant tomber la faible garnison du roi d'Aragon présente dans les enceintes.
De la prise du Roussillon par les Français à la guerre de 1793
Une nouvelle bataille livrée le 5 juillet 1654 se conclut par la reprise de la ville par les Français. La population, hostile aux Français comme la plupart des villages de la région, n'a pas accepté sa condition. Il y eut successivement la révolte des Miquelets, puis la Conspiration de Villefranche (en 1674), qui ralluma la guerre en Catalogne et amena Vauban à fortifier la région. Ce fut à cette occasion que fut construit le Fort Libéria. Mais l'insurrection fut de courte durée également, et Bernard de So, comte de Conat, le plus puissant des seigneurs locaux, eut pour charge de punir cette ville deux fois rebelle.
La période révolutionnaire fut assez violente à Villefranche. Il faut savoir que la ville hébergeait deux édifices religieux importants, construits à l'époque romane : le couvent St François et le campo santo St Paul (un campo santo, "champ saint" en français, était un cimetière particulier dont un seul exemplaire nous est parvenu : celui de Perpignan). À l'occasion de la révolution, ces deux bâtiments furent détruits, et les pierres furent disséminées un peu partout dans la ville. Ainsi, des travaux récents dans la cour de l'ancien hôpital militaire permirent de trouver un chapiteau et une base de colonne, réutilisés sur des portes cochères.
Durant la guerre franco-espagnole de 1793, la ville fut conquise par l'Espagne, mais pour quelques jours seulement. La ville perdit son importance au XVIIIe siècle et son déclin fut accéléré par le transfert de la viguerie à Prades en 1773.
Le XXe siècle : Désenclavement de la ville
Au début du siècle, Villefranche était un village relativement petit. Il était enclavé dans le creux de la vallée de la Têt et servait de village de repos aux voyageurs allant de la Cerdagne à la plaine. Afin de désenclaver la Cerdagne, il fut décidé de construire un train reliant Villefranche à Latour-de-Carol. La gare de Villefranche de ce que l'on appela par la suite le petit train jaune fut construite en 1904 ; elle fut l'une des premières à être bâties. Les moyens de transport allant croissant, la route menant en Cerdagne fut construite vers la fin du XIXe siècle. Cette route, dangereuse, était le siège de nombreux accidents. Villefranche garde le souvenir de celui de la diligence du 11 septembre 1907, qui versa dans la Têt à hauteur de la ville, mais sans qu'il y eût beaucoup de blessés, heureusement.
Souvenir des crues du Cady
Villefranche a été construite en bord du Cady, qui se jette dans la Têt. Cette rivière est sujette aux crues, comme n'importe quelle rivière descendant du Canigou. Déjà en 1869, une crue fit quelques dégâts dans les environs de la ville. Cela se reproduisit en 1919, puis en 1939, avant l'aïguat de 1940. L'aïguat, c'est le nom qu'on donne à une inondation par ici. Or, en 1940, il y eut des précipitations anormalement importantes, qui provoquèrent des crues un peu partout dans le Vallespir, les Aspres et la Têt. Les eaux s'accumulèrent et firent effondrer un pan de montagne entre Prats-de-Mollo et Le Tech, formant un barrage qui, lorsqu'il céda, provoqua d'inombrables dégâts dans toute la vallée. Cette épisode, bien connu des Catalans, masque un peu le fait que d'autres rivières provoquèrent des dégâts également, dans la vallée de la Têt et plus précisément, du Cady. C'est le 17 octobre 1940 que le Cady atteignit son maximum. Un repère est placé de nos jours sur les remparts, en mémoire de cet événement. L'eau pénétra par la porte de France et atteignit les premières maisons de la place Royale, mais heureusement, ici, la ville a été construite un peu en hauteur, ce qui ne provoqua pas une énorme catastrophe comme ailleurs. L'aïguat fut responsable de la mort de 48 personnes, quand même, et toute la plaine du Roussillon fut gravement inondée.
Par la suite, d'autres crues eurent lieu, mais heureusement avec moins d'importance. La dernière date de 1992.